Louis Sorin, le clown des cirques !
Et ce Tour des Cirques, on en parle ?Bon, avant tout je pensais pouvoir faire un récit simple, bref, intéressant à lire… Mais je viens de revivre ma course et élancé, je n’ai pas su m’arrêter, désolé. Si en cliquant sur « plus » tu fais pfff, vas pas plus loin! Et portable parti trop tôt… et avec les paysages en photos …
Après ce que je qualifierais d’une « bonne claque » suite à la Mandala du Mont-Blanc (by Les Chevaliers du Vent) mon envie n’était pas folle de participer un mois plus tard à ce Grand Raid des Pyrénées. J’avais cependant accepté le report de mon inscription suite à l’annulation de l’édition 2020 donc il y avait comme une « obligation ». La présence des copains de course à pied et d’une partie de la famille sur place m’a clairement poussé à me rendre dans ces Pyrénées. Malgré un mois sportivement « nul », je me persuade de prendre ce départ. Après tout, 120 kilomètres, j’ai déjà fait, même si le GRP semble être célèbre pour ses pierriers, ça sera une grande rando en essayant de profiter à fond des paysages et tant pis pour l’esprit course, pas de compétition ce coup-ci. Le risque de la compet c’est d’être dans un tout autre esprit et d’être « tête dans le guidon », à regarder où tu mets les pieds plutôt qu’admirer les sommets qui t’entourent. Or je veux profiter de l’occasion pour apprendre à connaître et reconnaitre ces montagnes
En allant retirer nos dossards la veille du départ, les copains m’apprennent que je fais partis des « favoris » de cet ultra trail. Aaahh… là, malgré mon envie de partir tranquillement pour une grande rando, je commence à entendre une seconde voie dans ma tête « aller tu vas pas décevoir les autres quand même, oui t’es pas en forme olympique mais si tu fais parti du top 10, y a moyen de faire quelque chose ? ! » Tout de suite ça change la donne, oui je suis fatigué mais après tout je n’ai jamais réussi à suivre de prépa spécifique et j’ai toujours réussi à finir mes courses, pourquoi pas là ? Sur le retour à l’appart, on encourage les participants du 60 km dont quelques copains et on croise plusieurs Vendéens, histoire de finir de me mettre la pression même si je suis encore persuadé que je vais faire une course « tranquille »Le sac prêt et avant de diner, Julien me partage son « étude » du tracé de ce Tour des Cirques, pas inutile à J-1 !
Jour J10H30 à Piau, on est relax à discuter à l’arrière du camion avec les copains RAPVistes. Sous un grand soleil, on se dirige tranquillement vers le départ où nous sommes 10 bleus et noirs à s’élancer sur ces 120 km. 11H, il est temps de partir car les enceintes de la sono mollissent un peu face à l’excitation du speaker…Ces premiers kilomètres se font en compagnie de Jo, notre avancée sur le tracé des pistes de ski n’est pas des plus intéressante mais on discute bien (avec un participant du Vendée Raid aussi !) donc ça passe crème. A ce stade, le gros du peloton du départ est devant nous et avec Jo, on partage le même avis : partir cool et voir après, les sensations.En terminant cette première boucle, nous voilà acclamé par le speaker! C’est cool d’être reconnu, ça dépend juste pour quelles raisons… « Oh le Poiré, ils font parti de ces irréductibles vendéens qui courent avec une flasque d’eau de vie dans le sac! » (Bon il a du confondre avec du rhum arrangé mais merci les copains! )Bref, première montée intéressante jusqu’à Port de Campbieil, l’allure est donnée, on dépasse plusieurs dizaines de coureurs, on est sur une bonne lancée ! Arrivés au col à 2600m, c’est le vent qui nous pousse à galoper dans la descente, et quelle descente ! Après avoir avalé un sandwich, ptite pause technique à mi chemin… Impec Jo me rattrape juste ! On finira cette longue descente dans une foret lumineuse mais qui nous protège bien des rayons du soleil jusqu’à Gèdre.
Premier ravito et… première fois où on me dit « c’est qu’il y a toute la famille qui attend derrière les barrières pour manger ?! » Alors, effectivement j’ai demandé à ce qu’on me serve plusieurs tranches de jambon sec, jambon blanc et saucisson, en plus d’un riz au lait et des abricots secs mais bon, on vient de faire 25 km, ça creuse ! Encouragements de ma grande sœur et ses enfants au passage, je repars refait ! Sans oublié un ptit bonjour de Quentin D ! On attaque une grosse montée boisée qui nous protège du soleil. « A la sortie de la forêt, ça sera le désert jusqu’à Gavarnie » me disait ce bénévole au ravito… alors je bois avant de dessécher. Je bois et je doute. Ici c’est l’hécatombe, étalés sur les premières centaines de mètres de cette montée, c’est une vingtaine de coureurs assis au bord du chemin, déjà « dans le mal ». Chaleur, digestion, reparti trop vite du ravito ? Pas de sourires sur ces visages mais après éprouver de la compassion, c’est de la motivation que je retrouve. L’état critique de ces coureurs me rebooste, « si je ne suis pas comme eux c’est que je me suis géré jusque là » alors j’y vais, je grimpe. Je préviens Jo que c’est parti, chacun va trouver son rythme maintenant.Et jusqu’au prochain ravito (comme si ma course était plus marquée par les ravitos que par les pics et les cols que nous franchiront…) c’est un régal. Tranquillement, je rattrape plusieurs gars du coin avec qui je discute un peu au passage, on est tous frais, c’est cool ! D’autres connaissances sont encore devant mais elles attendront ! On arrive face au Cirque de Gavarnie, et là, on se rend compte qu’on ne pèse pas lourd face à l’immensité du paysage. Waw. Photos et ravito. C’est ici que je salue Nico !Assisté par Quentin, il repart lorsque je fais les réserves. Il y a moins de coureurs qu’au premier ravitaillement, pas les mêmes traits de visages, ça sent plus la compétition. Mais avec Agathe et Quentin on discute, j’écoute ses conseils et j’apprends aussi que c’est dur pour quelques bleus et noirs à 10 km de là, pas cool…
Aller, après avoir bien mangé, bien bu, je ferais bien une sieste mais il est trop tard, et trop tôt pour une nuit donc je repars, car « c’est ici que la course commence ». Belle et longue montée en vue. Le son de mes bâtons sur les cailloux rythme mon ascension, je salue 2 autres gars du coin au passage, à croire que le GRP réunit les amateurs de trail du Grand Ouest ! Pause boisson-bonbons à mi-pente au pied d’un refuge avec vue splendide et les lueurs du soleil qui commencent à tourner au rouge. Ça promet pour tous ces campeurs déjà installés ! Encore 4-5 kilomètres d’ascension avant 15 km descendants jusqu’à Gèdre, et là ça déroule ! Doucement pour que les cuisses tiennent bon, mais quel plaisir ! C’est peu avant le lac des Gloriettes que je rattrape Nico (enfin !) et qu’on partage un bout de chemin ensemble mais je m’empresse de rallier Gèdre pour refaire le plein ! Je retrouve ma sœur et ses enfants, Quentin également, tous fidèles au poste. Je m’assois, mange et réfléchi pendant que mes accompagnateurs sont au taquet. 60km, moitié fait. La nuit est belle et bien là, on repartira avec la frontale. « On » car Nico est presque prêt à repartir et qu’il est conseillé d’être à plusieurs la nuit pour éviter des accidents donc nous revoilà à deux pour plusieurs kilomètres. On progresse ensemble jusqu’à un moment de « vraiment bien » où j’ai bien voulu entendre son « Vas-y ! Tu vas te faire chier si tu restes avec moi ». Du coup c’était reparti dans une nouvelle montée quand j’ai dû me stopper à un ravito maison. Non mais sérieux, il est presque minuit, perdu au milieu de la montagne, lorsque tu tombes sur cette dizaine d’artistes qui t’offrent biscuits, café ou thé, refait ! Il reste encore quelques km d’effort avant la base vie de Luz-Saint-Sauveur et jusqu’à ce 75ème km, je serais physiquement bien et atteindrais la 10ème place. C’était devenu l’objectif de ces dernières heures. J’y suis arrivé et je voulais le dire aux copains qui me chambraient du favori que j’étais sur cette course ! J’ai été 10ème, maintenant, place à une bonne pause ! Pause durant laquelle j’apprends l’abandon de certains copains, donc finalement on va rester discret tant qu’on ne sait pas l’état d’esprit dans lequel ils sont…A ma grande surprise sur ce ravito, je croise Jérôme (alias la Légende de Mervent !), encore un visage familier qui est lui sur le 220km et s’en sort bien jusque là ! Chapeau bas …
Après avoir fait le plein avec Quentin, Nico et moi repartons. Cette partie là de la nuit sera la plus longue pour moi avec de longues minutes à lutter contre le sommeil, à chercher contre quel rocher je vais pouvoir m’adosser pour dormir un peu… Rejoins par un second Nicolas, c’est finalement un grand pierrier que nous allons traverser ensemble sans faire de pause. Nico en leader mène la marche et trouve le bon rythme et les bons mots pour nous garder dans ses pas. Ouf un refuge/ ravito au loin, je vais pouvoir me poser ! Autant je profitais biens des ravitos précédents pour refaire les stocks que celui-ci ne m’apportera rien si c’est n’est 25 minutes de repos dont 5 de sommeil allongé sur un banc peut-être ? Finalement ça m’apporte bien plus que je pensais ! Go pour une descente assez technique mais… ça glisse avec cette poussière sur ces rochers lisse…pas de grosse chute, ça va ! C’est en bas que je rattrape mes coéquipiers de nuit ! Aller on est presque à Tournaboup, prochain ravitaillement, et dernier où je vais voir mes fidèles accompagnateurs ! Je me refais une petite santé, une bénévole annonce que le soleil devrait paraître d’ici 1h30, vivement ! On recroise notre Jérôme qui opte pour une brève pause dodo avant de repartir pour finir ses 220 km. Je dirais bonne idée !Nous repartons à quatre, Nico x2 , Fabien et moi, tous sur le 120km. Enfin 120 devenu 130… et oui, en s’informant auprès des bénévoles, on découvre que le parcours est légèrement plus long que prévu ! Qu’est ce que 10 km au point où nous en sommes ?!J’accuse le coup depuis le départ du ravito et me retrouve souvent dernier de notre quatuor, second coup de «moins bien » semble t-il. Malgré l’extinction des frontales grâce à l’apparition des premières lueurs du jour, je ne suis pas au top. 110ème km, avant dernier ravito, j’annonce aux gars mon envie de me re(poser), quinze minutes sur un lit de camps, 2-3 de sommeil peut être, mais je n’ai plus faim, plus soif mais il faut se « forcer » pour ne pas tomber…
Je repars avec en ligne de mire trois petites silhouettes familières qui arrivent en haut de l’avant dernier col, La Hourquette Nère.Je ressens les biens faits de ces 15 minutes de repos, car j’arrive à repartir correctement. Et c’est en haut du col que je reconnais enfin où je suis vraiment et qu’avec un fond musical, je commence à lâcher les chevaux dans cette descente. Les premiers rayons de soleil passent au dessus des pics montagneux pour illuminer les lacs en contrebas, c’est juste vraiment beau Dans mon élan, je rattrape les gars qui se sont eux aussi, mi chacun à leur rythme. Mon sauveur de la nuit, Nico, est toujours aux avant poste, nous nous séparerons finalement ici, à 15 km de l’arrivée car égoïstement, je me sens pousser des ailes. Je galope ! Les jambes qui tiraient un peu ne semblent pas vouloir accentuer leur cas, on y va !Dernière montée familière jusqu’au Portet, mais quand même plus facile en télésiège ou dans le sens inverse sur des skis ! Je marche, seul (puis avec un mouton aux trousses!) et en profite pour checker mes messages car il semblerait que la famille du RAPV soit en train de penser à moi! Notre journaliste interne me suit de prêt et me motive un bon coup pour faire un Top 10. C’est chose faiteCol du Portet, 2215m d’altitude. Vue dégagée sur la vallée de Saint-Lary- Soullans mais encore trop loin pour voir tous les villages qui la font vivre.
L’arrivée est à 13 kilomètres de là, à Vielle-Aure, 800m d’altitude. Autrement dit 13 km de descente… Je range les bâtons malgré les conseils d’un sportif du coin qui suit ce trail : « Sur la fin c’est assez raide, t’auras surement besoin des bâtons » avant de regarder le classement en live (qui déconnait dur…) et de me dire « mais si tu te débrouilles bien tu pourras peut être en rattraper, j’en ai vu passer là il n’y a pas longtemps ». Ce coup-ci c’était le GO final ! Go pour une descente légère mais à allure correcte avec slalom entre les vaches qui occupaient le routin jusqu’à la sortie de mon moment euphorique : plus une goutte d’eau !Et c’est à ce moment là qu’un second sauveur arriva dans ma course. Niels, un (bon) coureur qui a été contraint d’abandonner après une trentaine de kilomètres sur le Tour des Lacs (80 km), me dépasse à vive allure pendant que le coach m’appelle tranquillement pour prendre des nouvelles (savoir si on allait prendre une bière ensemble avant qu’il aille au resto par exemple ! 230 km ça ne l’a pas assez fatigué apparemment !). Bref je m’accroche à Niels qui m’aide jusqu’à Soullans où nous remplissons nos flasques dans une fontaine. Après ça et malgré son abandon, je comprends qu’il est en grande forme et que lui aussi se rend à l’arrivée, alors on y va. Pourquoi et comment, je ne sais pas, mais on a tout lâché (à fond quoi !). La joie d’une arrivée proche ? Le bonheur de retrouver ses proches ? L’excitation de « faire une perf » ? Je ne saurais dire, mais retrouver des jambes indolores après 125 km et courir comme un lapin, c’est à peine croyable mais magique !
Bref le clown a fini son cirque, après 130 km et 7500m de dénivelé positif parcourus en moins de 25H. Quelle expérience. Mercis particuliers à Nicolas, Quentin , Adèle, Julien et les enfants et les copains du RAPV présents sur place. Et un grand merci à celles et ceux qui m’ont soutenus à distance, et auxquel(le)s je n’ai pas prit le temps de répondre immédiatement.Oui Bruno je n’es pas toujours été en mouvement, mais cette fois si je n’en suis pas mécontent