LE GRP c’est Fou
Après L’UTPMA de Juin et ses 112 km avalés pour 5500 D+, un nouvel objectif pointait le bout de son nez. Celui-ci est sans aucun doute encore bien plus fou, voir inespéré pour moi il y a quelques années !
(Pour rappel, lors de mon arrivée en 2018 du 80km, la première phrase que j’ai pu dire à mon papa était : JAMAIS ! Je ne le ferais plus !). Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis !
Du coup, cette année pour moi est ciblée d’objectif concrets et ambitieux, je vais même dans l’inconnu car je n’ai jamais fait ces distances, mais une énorme envie me booste à réaliser ces défis.
L’UTPMA a été une superbe expérience mais qui m’a laissé un peu dans le doute suite à mon inflammation du genou sur les 40 derniers kilomètres !
La Prépa
Après une quinzaine de jours de repos pour le genou, je décide d’adapter ma prépa.
Le but est de continuer à faire du volume et de la muscu mais sans trop d’impact pour le genou encore fragile.
C’est trouvé, le vélo de route et vtt vont faire le job, à moi de l’adapter comme il faut et le coupler avec de la course à pied pour ne pas me faire mal.
Dans l’ensemble, tout s’est plutôt bien passé, le genou est toujours gênant mais pas si douloureux que ça, on va croiser les doigts pour que ça le fasse !
J – 3
Je reprends ma liste de matériel de l’UTPMA, que j’ai adapté pour ce GRP, et c’est parti, quelques heures pour faire les sacs de base vie, le sac de départ, le sac d’arrivée, le camel, le duvet pour le
camping, etc. Je check toutes les listes pour être sûr qu’il ne me manquera rien. Une bonne chose de faite.
J – 2
Mon pote Thomas passe me chercher, nous faisons la route ensemble dans son van qui nous servira de logement pour ce week-end.
Une demie journée de route plus tard, nous voici à vielle Aure, pour que Thomas prenne son dossard (il court sur le 60km), une ou 2 bonnes bières en terrasse et nous repartons pour le camping. Soirée
cool en perspective, demain son départ est avancé à 5h30.
J – 1
Après un réveil tranquille, je retrouve mes parents pour aller voir Thomas sur 2 ravitos, 1 vers 10H et l’autre vers 13H. Petits casse-dalle en montagne et voilà, c’est l’heure d’aller chercher le dossard !
Arrivée sur place, pas de stress, le fais de savoir que toutes mes affaires sont bien faites et au bon endroit me rassure (merci Mr Pierre Jourdain), du coup tout se passe bien, on discute avec les gars du RAPV,
on boit quelques bières (peut-être un peu trop une veille de 160 km) mais ça ne me dérange pas. L’arrivée de Thomas sous une pluie battante mais avec le sourire clôture cette belle journée.
Un repas devant un match de basket à la télé et une petite bière finissent cette soirée. Je prépare mes affaires pour le lendemain, une petite nuit et c’est parti.
Jour J
Le réveil sonne, 3H45 du mat, je suis déjà réveillé depuis une petite heure, je mange vite fait, m’habille, met mon sac, ma frontale et me lance pour 20 minutes de marche pour rejoindre le départ. Le stress n’est toujours pas présent, plutôt de l’excitation, hâte de me lancer. Je retrouve les 3 copains du RAPV qui vont prendre le départ avec moi, + Francois le frère de Juju B.
La petite HOLA de départ, le speaker nous chauffe, l’ambiance est festive mais aussi discrète, la concentration et le stress sont présent pour certains. Moi j’ai envie de partir, c’est tout.
Top départ, les chevaux sont lancés, quelques dizaines voire centaines de personnes sont au bord de la route pour acclamer notre départ et nous souhaiter bon courage, ça fait chaud au cœur.
La route nous accompagne sur quelques kilomètres, jusqu’à Vignec, là où le coach est présent pour nous souhaiter une bonne course, il part dans 2 heures pour le 120Km. Sortie de Vignec, on prend les bâtons et c’est parti pour l’ascension jusqu’au col du Portet, je connais bien cette section pour l’avoir fait plusieurs fois, des lacets et quelques bonnes côtes, mais tout ça se fait dans la bonne humeur, les discussions sont décontractées, le bal des lumières frontale dans la montagne fait son apparition. Le soleil ne nous dominera pas ce matin, les nuages sont là dès le lever du jour, le col du Portet est là.
On ne traine pas et l’on bascule à petites foulées pour arriver au ravitaillement des Merlans. C’est le premier et ce sera également le dernier dans quelques heures si tout va bien.
Ravitaillement rapide
Petit ravitaillement rapide, du salé et du sucré, moins de 10 minutes et c’est reparti. Je repars avec Julien et le patron (pas pour longtemps), mais rapidement David nous prend de vitesse et part sur un rythme plus fort, il va faire sa course.
Juju B et son frère son juste derrière, on avance direction le col du Bastanet, encore une fois on connaît bien. Julien me lâche un petit « Ah ça y est, je suis dans ma course, le stress n’est plus là, c’est parti ». Cette partie se fait très bien, on est dans un cadre de fou avec des lacs partout et l’impression d’être des privilégiés. On profite tout en discutant et l’on arrive au col, il se fait bien également, en même temps on est encore tout frais, ça fait seulement 4 heures que l’on est parti.
On bascule de l’autre côté pour la prochaine étape, La Mongie. Cette partie est très jolie, criblée de cailloux, mais tellement belle. Ensuite viens le Serpolet, je n’ai pas un bon souvenir de lui, une montée sèche que je montais à moins de 2 km/h il y a 4 ans !! Cette fois-ci ça passe bien, par contre, au moment de basculer pour La Mongie, l’humidité est là et c’est très glissant, la descente est rude également. Petits pas petits pas, on arrive avec Julien à La Mongie, mes parents et Thomas sont là pour nous accueillir, ça fait toujours du bien. Ils nous disent qu’on a des bonnes têtes, nous sommes à 6H30 de course.
On prend le temps de se ravitailler, Juju B à une pointe à sa cuisse, il prend beaucoup de temps mais on décide de repartir tous les 4. C’est aussi ça l’aventure avec les copains.
On repart direction le fameux pic du midi
Quelques minutes plus tard et un bon massage pour Juju B, on repart direction le fameux pic du midi.
Il va falloir faire l’ascension jusqu’au Sencours, une section longue, avec une première partie sympa en single, et une seconde avec des cailloux, moins agréable. Julien Neau et François sont bien. Ils prennent les devants pendant que Juju B et moi prenons plus de temps. Je suis patient, je sais que cette partie est un peu longue et je suis un peu moins bien, je regarde le peu de paysage que l’on à, et j’atteins le col de Sencours 3-4 minutes après Francois et Julien. Juju B nous rejoint, ce n’est pas la frite.
Toujours la cuisse, et la tête ne suit pas. Heureusement un caméraman nous chope et nous interview, on discute avec lui et rigole pas mal. On lui propose même de venir faire l’ascension du pic avec nous car une fois là-haut, la petite fiole que j’ai dans mon sac pourrait servir ! On repart direction le pic, Julien, Francois et moi partons sur un bon rythme histoire de ne pas trainer.
On a dit à une bénévole qu’on ferait l’aller/retour en 1h15 ! Cette montée se fait bien, la fin est plus raide mais ça passe. Un bref arrêt, la vue n’est pas très lointaine. Allez on repart.
Descendre en courant pour atteindre Sencours retour et son ravitaillement très atypique, dans une cabane en pierre, avec de la purée, de la soupe, en gros je mange plutôt bien. Nous sommes à 10h30 de course
et environ 46km de fait !
Nous attendons notre Juju B quelques instants, François repart devant car il pense être moins bien en descente. Problème, Juju B ne va pas bien. Il ne prend pas plaisir car il a mal à sa cuisse. Il est en pleurs.
Nous faisons tout avec Julien pour le convaincre de repartir, sa famille se sent impuissante, mais après les bons mots, il décide de repartir avec nous, ouf !
C’est parti pour une bonne partie de descente, pas très technique. On court bien, Julien avance bien pour revenir sur François. Moi j’essaye de faire le lien entre tout le monde ! Juju B traine un peu et Julien part fort, je me retrouve donc vite un peu seul, mais ce n’est pas grave, j’aime bien ça. On va direction le lac Bleu, un joli lac apparemment. J’y suis passé en off il y a 2 ans mais malheureusement on ne voyait rien.
Parmi tous les gros blocs de cailloux, il y a bien un chemin !
On passe par le col de la Bonida, un col ou, quand on est à son pied, on se demande par où est-ce que l’on peut passer pour aller de l’autre côté !!! Tout compte fait, parmi tous les gros blocs de cailloux, il y a bien un chemin ! Ensuite, on longe le Lac bleu par le sud mais la bruine nous bouche la vue, dommage ! Ensuite, c’est le col de Bareille, et il est très spécial, il n’est pas très haut mais il est vicieux, on ne voit pas le bout, il très raide par moment, bref.
Pierre nous avait dit que la course commençait ici, que les premiers coureurs fatiguaient ici, alors je prends mon temps et grimpe sans trop d’encombres. Direction Hautacam, une descente ou l’on peut un peu courir, et puis dans la deuxième partie, on longe la montagne pour aller jusqu’à Hautacam. C’est un peu long et ils nous font redescendre d’un côté de la station pour remonter de l’autre ! Cette partie entre les 2 ravitos fait 19km, c’est la plus longue.
J’arrive enfin à Hautacam! Julien et François viennent de repartir il y a peu et moi, je suis un peu fatigué, nous sommes à 66/67 km, et toujours dans la brume.
Mes parents et Thomas sont encore là pour m’accueillir, et ma fois, ils me font vraiment un bien fou au moral. On discute, et eux sont aux petits soins pour moi, mes dessous de pied me chauffent alors je
décide de refaire mes strap sous mes pieds et de changer de chaussettes. Je check mon portable et là, Fait chier ! Il a dû faire des codes tout seul dans mon sac et il est complètement bloqué !
Il m’en faut un absolument, si je dois appeler en cas d’urgence, ou même appeler la famille dans les moments dur, et même pour mettre un réveil si je dois dormir. Heureusement mon gentil papa me propose son portable, ouf. Ils vont même donner le numéro aux copains et à La famille pour qu’ils puissent m’envoyer des messages. Je respire un peu.
C’est reparti pour une longue descente vers Pierrefitte, une route, puis un chemin ou l’on peut courir à vive allure, ça fait du bien.
Les km défilent, et la tête reprend le dessus. Je suis bien et me fait plaisir sur cette descente. On arrive à Pierrefitte et il faut encore traverser la ville, puis il faut remonter un petit raidar (obligé de remettre la frontale car la nuit tombe), une petite route que je partage avec un monsieur d’un certain âge pour arriver au ravitaillement, même mieux car c’est la première base vie. Nous sommes à 16H30 de course et 77km.
Première base de vie
La base vie est là, c’est une grande salle avec des tables et des chaises, un grand ravitaillement avec des pâtes, de la soupe, du riz au lait, des smoothies, bref de quoi encore bien manger. Il y’a aussi de quoi prendre une douche (un bon tuyau d’arrosage avec de l’eau gelée, ça fait un bien fou). Il y a aussi des Kinés et masseurs si besoin. Julien et François sont là depuis 30 minutes, ils sont en train de manger. Moi je commence par me changer, j’ai prévu une tenue complète. Je refais également mes straps sous les pieds, on ne sait jamais. Les gars repartent et Juju B arrive, il a l’air mieux. Il est bien décidé à continuer son aventure, à son rythme, comme moi.
Après quelques messages et après m’être bien ravitaillé, je repars en laissant Juju B en bonne compagnie. Il a décidé de se faire masser !
Je reprends mes affaires, sort dehors, appelle Marie pour donner des nouvelles avant la nuit et lui souhaiter une bonne nuit à elle et les enfants.
Le destin va faire que je ressors de la base vie en même temps que le monsieur avec qui je suis arrivé, incroyable. Alors on décide de repartir ensemble car la suite du parcours est un long faux plat montant (voie verte) pour aller jusqu’à Cauteret. Nous mettons un rythme de marche rapide et cadencé tout en discutant vraiment bien, Ce monsieur est vraiment trop gentil, il a 60 ans et fait son troisième ultra de l’année, hallucinant !
Les kilomètres avancent normalement, c’est un début de nuit tranquille, sans difficultés particulières. Le temps passe vite en bonne compagnie, la fin de cette partie est un peu longue et endormante, et c’est ainsi que nous arrivons sur Cauteret. Un petit tour dans la ville de nuit, et nous commençons à monter une partie très nature, un petit bois visiblement.
Les jambes sont un peu lourdes, on se relaie avec Jean-Paul (le M. de 60 ans), on monte doucement mais on avance, lacets après lacets on arrive en haut. La descente n’est pas si compliquée mais elle est de nuit, et mon genou gauche commence à être douloureux, ah non pas ça ! Je gère mes appuis, m’aide de mes bâtons, bref tout est bon pour essayer de protéger ce genou. Enfin, retour sur Cauterets, le ravitaillement un peu spécial (dans le casino de Cauteret) est là, Je laisse mon ami d’un soir faire sa course. Moi je ne suis pas au mieux, nous sommes au km 94, il est 1h30 du matin et nous en sommes à 20H30 de course.
L’ambiance de ce ravito est spéciale, entre les gens fatigués, les gens en manque de sommeil, ceux qui dorment déjà dans des lits de camp, et ceux qui discutent de la suite du parcours sans être sûr d’y arriver, c’est pesant. Bon, moi j’ai besoin de faire un petit stop ! Première chose à faire, protéger ce genou. Du coup, je commence par sortir toutes mes affaires, strap, ciseaux, et c’est parti pour un strap du genou (heureusement que coach m’a refait un petit brief là-dessus la veille de la course). Après 10 bonnes minutes, le strap est fait, il n’a pas l’air trop mal, on croise les doigts pour que ça suffise.
Maintenant, je fais quoi ?
Je n’ai pas faim, pas soif, mal au genou ! Allez, je prends un Doliprane et je décide de m’allonger quelques minutes sur un lit de camp. Il est 2H03, je mets le réveil pour 2H15, ça me laisse 12 minutes pour récupérer. J’entends les gens autour, il y a du bruit mais au bout de quelques minutes, je sens que je pars un peu.
Dring ! Ça sonne déjà ! Je me lève, le Doliprane a fait effet, cool, une bonne chose. J’ai dû dormir 3 ou 4 minutes, et je le sens, je vais mieux. Je mange une petite soupe, un peu de fromage et de jambon, rempli mes flasques et sors dehors. Je décide de prendre mes écouteurs, ça m’aidera peut-être. C’est reparti, on repart pour une section de montée très longue, d’une dizaine de kilomètres. C2C, chinese man, la musique rythme mes pas et me donne de l’entrain. Je suis vraiment bien dans cette montagne, seul, de nuit, c’est du pur plaisir. Ma frontale m’éclaire vraiment bien, la montée est longue mais pas très sèche, ça se fait très bien. Je double une ou 2 personnes sur cette montée, je vois également quelques frontales plus loin, c’est vraiment sympa de nuit.
Arrivé là-haut, on descend légèrement pour arriver au ravito de Béderet. Un tout petit ravito, nous sommes 5 ou 6 coureurs, il est 4h30. Les bénévoles sont hyper sympas, à nos petits soins. Je ne reste pas très longtemps car il
bruine un peu et ne fait pas si chaud que ça. Je demande à une bénévole par où il faut repartir car on ne voit pas très bien. Elle me dit « bah par là, vous suivez ces 2 balises et c’est tout droit ».
Euh vous êtes sur ? Il n’y a pas de chemin là ! Lui dis-je.
Bon bah j’y vais. Je me lance, et là, c’est hallucinant, je ne suis jamais passé par un truc aussi raide ! Une montée dans de l’herbe à vache couchée par l’humidité, tellement raide que je suis obligé de m’arrêter tous les 30 mètres ! Il va falloir que je prenne mon mal en patience. C’est dur, long, il commence à faire froid alors je m’arrête pour mettre
ma veste de pluie. Cette montée fait mal, mais une fois arrivée là-haut, nous sommes au col de Riou, le jour va bientôt se lever et j’ai la chance d’avoir face moi, une chaîne de montagne, avec l’aube derrière elle, et une mer de nuage à ses pieds, c’est magnifique. Je m’arrête 2 ou 3 minutes avec 2 autres personnes pour contempler, ça requinque dur.
Maintenant on redescend sur Aulian, dans la station de ski de luz Ardiden pour le ravito. Quelques pistes de ski pas très agréable à emprunter et J’arrive. Il est 6H50, Nous sommes à 110 km et donc 25h50 de course.
Ce ravitaillement sera peut-être un de mes plus agréable, tout simplement car en arrivant, les bénévoles nous proposent des CRÊPES !!!! Oui crèpes Nutella, confitures, sucre, à volonté. Autant dire que je me suis gavé. Je donne
un petit gaviscon à une coureuse qui a des brûlures d’estomac, (j’espère que ça l’a soulagé) et je décide de ne pas trainer. La prochaine section est une descente de 10 km pour arriver jusqu’à Luz, la seconde base vie. C’est parti, nous entrecoupons la route plusieurs fois avant de pénétrer dans un chemin fort sympathique. Le jour est levé, les jambes vont bien, ma tête va bien, tout va bien. Si je n’ai pas trop traîné, je vais peut-être voir les copains à la base vie. Alors je cours, les jambes répondent bien. J’arrive à Luz, et encore une fois, comme nous avait dit Pierre, attention ! Quand tu
arrives à Luz, c’est long. Il faut traverser toute la ville ! C’est ça, les 2 km pour rejoindre la base vie me paraissent très long. Aller, dernier virage et j’arrive. Et là, surprise, mes parents sont là avec Thomas.
Ils ne devaient pas venir. Je suis trop content de les voir, même si ça ne se voit peut-être pas. Ils sont arrivés il y a 2 minutes, timing parfait.
Seconde base de vie
On discute un peu, se serre dans les bras. Il est 8h30 (j’avais prévu 9h sur mon planning, c’est cool je suis en avance !) et nous sommes au Km 120. J’avance au ravito, François et Julien sont là depuis 20 minutes. J’ai même regagné du temps sur eux. Ça fait du bien de les voir, ils ont l’air d’aller plutôt bien, ils ont des bonnes têtes. Je sors dehors pour être un peu plus avec mes parents, je me rince avec le tuyau d’eau gelé, mais ça fait trop de bien, je mets carrément la tête dessous. Je retourne me ravitailler, me changer et ressors tout frais. Prêt à arpenter cette deuxième journée.
Mes parents m’ont apporté du melon, c’est juste trop bon, j’attendais ça depuis longtemps. Une petite accolade et 2/3 bisous, direction Tournaboup. C’est parti, on attaque par une montée assez rude mais très agréable, en forêt, à l’ombre du soleil qui commence à taper un peu. Je double 2 ou 3 personnes sur cette montée. Tout va bien. La suite est un petit replat avec des petites relance, ou je m’amuse à courir plutôt bien, ce n’est pas technique donc bien agréable. Nous coupons un petit ruisseau avec une indication « Tournaboup 8 km ». Cool ! et là c’est bizarre, c’est petit faux plat descendant, et j’ai l’impression que mes jambes n’ont plus envie. Je n’arrive même pas à essayer de courir. Je marche, je vais bien y arriver même en marchant.
Plus j’avance et moins ça va ! Ce n’est pas possible, c’est plat et j’avance plus, ma tête commence à cogiter et rien ne va. Le ventre ne va pas bien, plus soif, plus faim, très mal aux jambes, obliger de m’arrêter pour m’allonger par terre. Ça va être long si c’est comme ça jusqu’au bout. Je mange une pomme pot, arrive à boire un peu, et repart tant bien que mal. je me force vraiment pour alterner un peu de course et de marche et arrive à la route. J’arrive à trottiner enfin et rattrape du monde qui marche. Je vois que je ne suis pas le seul à trimer un peu. Ce n’est pas le top cette petite route, mais elle à l’avantage de m’amener jusqu’à Tournaboup, un ravito que je connais pour y être passé sur le 80km. J’arrive enfin, il y a beaucoup de monde car c’est le point où toutes les courses se retrouve (le 80/120 et 160km). Il est 13H et j’en suis à 135km.
Je sais que je vais finir, je suis là, et je connais bien la fin. Je me ravitaille, ça ne passe pas top mais ça passe. De la soupe encore une fois, un petit pot de riz au lait, de la pastèque, ça fait du bien.
Les bénévoles sont encore une fois au top, nous prennent nos flasques pour remplir eux-mêmes. Je reste assez peu de temps car je veux rejoindre Thomas et mes parents qui m’attendent à l’extérieur. Ils sont encore là, c’est trop cool. Ils voient bien que je ne suis pas au mieux (ils me proposent une bière ou autre chose mais je n’en veux même pas). Je me pose et décide même de m’allonger quelques minutes dans l’herbe, à l’ombre du tunnel de remontée de ski. Apparemment, mon souffle est rapide, et se ralenti peu à peu, je dois m’évader un peu. Il fait chaud, alors hop, je décide de repartir et ne pas trainer.
Crème solaire, quelques bisous, et c’est reparti. C’est la dernière fois que je vois mes parents avant l’arrivée normalement. Thomas me fait le plaisir de venir avec moi sur le début du sentier, on discute un peu et ça me remet bien dans ma course. Dernière accolade avant l’arrivée et l’on se quitte. Marie-Agathe a essayé de m’appeler. Je la rappelle, pour prendre des nouvelles d’elle et des enfants, ils ont l’air d’aller bien et ils me soutiennent à fond. Ça fait du bien de les entendre. Aller maintenant on avance. Je prends un petit rythme, pas très fort mais régulier. Kilomètres après
kilomètres, cailloux près cailloux (il y en a beaucoup sur cette partie), j’avance. Je me souviens de chaque partie sur cette section, et sais qu’une fois arriver à la cabane d’Aygues Cluses, il me restera qu’une seule grosse montée.
Justement, j’y arrive. Tout petit ravitaillement ici, je ne reste pas plus de 10 minutes et je repars. La voilà, la Hourquette Nère, un passage ou ça monte fort, pas très longtemps mais ça monte. Je prends mon temps, mange une pâte de fruit et une pomme pote pour me donner un peu de sucre pour cette dernière montée. Après 2 petites pauses, je suis au col, la vue est imprenable, avec un temps magnifique, c’est sublime. On va basculer dans le Bastanet.
A partir d’ici, je commence vraiment à me projeter à l’arrivée !
C’est fou, il me reste pourtant 20 Km. Bref, je pars tranquillement, c’est agréable, les jambes répondent bien en descente, je me dis déjà que c’est bon pour les 12 derniers kilomètres, si je peux les courir, je vais gagner du temps et des places, c’est bon pour le moral. J’avance et peu à peu je me dirige vers cette fameuse sapinière. Celle que l’on n’aime pas tant que ça car ça descend tout doucement, mais c’est tellement technique (beaucoup de gros cailloux) qu’il est presque impossible de courir pour moi. Alors je vois les coureurs du 80 et quelques un du 120 qui me doublent. Ils me félicitent déjà tous, me lance un petit « respect mec » et disparaissent. Ça me touche, et me donne encore plus de motivation. La descente est très longue en marchant, mais pour une fois, vue que je la fais de jour, ce n’est pas si désagréable.
Le ruisseau qui court à côté me tiens compagnie, les gens qui me double aussi, je sens cette atmosphère qui règne, celle qui te dit que c’est presque la fin, que tu vas être finisher. Quelques petits pas dans les courants d’eau que l’on traverse, et là ça remonte.
Enfin, on entame la remontée vers le ravitaillement des Merlans, le même que le premier ou je suis passé il y a plus de 30H. Je pousse fort sur mes bâtons pour avancer un peu plus vite, je me permets même de doubler dans cette petite section qui monte. Mais quoi ? C’est lui devant moi ? Jean-Paul, non mais ce n’est pas vrai ! Il est là, seul, on discute
rapidement mais il est concentré, il veut finir et est un peu fatigué. Je lui dit de s’accrocher à moi, mais je vais trop vite, moi aussi je veux finir. C’est un peu égoïste mais ce 160, je me suis dit que je ferais MA course, et je veux la finir comme il se doit. Je ne veux pas revivre comme le 80km ou j’avais beaucoup attendu les copains. Bref, je monte, longe cette montagne qui domine le lac de l’Oule, et arrive enfin au Merlans. Il est 18H05, 37H05 de course et 156 km de fait.
Nous sommes applaudis par les bénévoles, qui comme à chaque fois sont irréprochable. Je me pose sur une chaise avec déjà dans la tête l’idée de repartir. Je mange surtout du sucré car je sais que je vais essayer de mettre de l’intensité dans la dernière descente. Le temps qu’on me remplisse mes flasques d’eau, une dernière orange et je prends mon camel sur moi. Remercie chaque personne de l’organisation et repars. J’ai dû prendre 10 minutes pas beaucoup plus. Je ressors mes bâtons, et enclenche un rythme fort pour ces derniers 200 mètres de dénivelé positif. C’est la piste verte de la datation de St Lary, celle qui mène au col du Portet. Je croise beaucoup de gens me félicitant, dont Emilie du RAPV qui vient accueillir son héros pour son dernier ravito (Micka a enchainé le 60km, le lendemain le 40km, et le 3eme jour le 80Km ! Énorme). Le col du Portet étant sous mes pieds, je range mes bâtons, c’est la dernière fois.
Je m’élance parmi quelques coureurs, les premiers mètres de descente sont un peu dur et fond mal aux quadriceps, mais franchement, la tête est tellement bonne que ça ne me semble même pas gênant. Je cours à bonne allure et commence à réaliser ce que j’avais en tête. Je double 1, 3, 5, 10 personnes, ça n’arrête pas. Il y a des coureurs qui marchent et n’arrivent presque plus à poser le pied tellement ça leur fait mal. Il y en a qui sont allongés par terre car ils crampent. Moi ça va, et malheureusement, de voir ces gens dans cet état, ça nous donne encore plus d’énergie, ce
n’est pas très cool mais c’est comme ça que je le ressens. La vue est dégagée et l’on aperçoit la vallée de Vielle Aure, là où je vais. Il reste un dernier passage compliqué, la descente de Soulan.
Une descente à pic, qui fait mal aux cuisses, on peut la descendre sur les fesses tellement elle est rude. Je passe cette barrière à vache et me lance dans la descente.
Hallucinant, mes jambes répondent
Hallucinant, mes jambes répondent, je cours sans m’arrêter, je double encore et encore, c’est juste ouf ! J’arrive à Soulan, quelques personnes sont là pour nous applaudir. Il reste une section de descente très douce, comprenant de
la route, des chemins en lacets etc. Bon je lâche tout. Je cours à vive allure, comme si j’avais fait 40 kilomètres. La plupart des participants marchent, mais moi je cours, je n’en reviens pas. Les kilomètres défilent, je pense à avertir mes parents et Thomas et que j’arrive bientôt, plus tôt que prévu. Les derniers chemins de traverse sont remplis de cailloux glissants, mais je cours, je me demande même comment ça se fait. Je me retrouve à doubler 3 copains de la Cap Nat dans les derniers kilomètres, ils ont fait toute la course quelques minutes devant moi. J’arrive à Vignec, passe
dans le centre où il y a peu de monde, prend la route qui descend vers Vielle Aure, toujours en courant.
Dernier sentier, celui qui longe le ruisseau avant d’arriver. Comme à chaque fois, ce moment est très dur émotionnellement pour moi, car à 500 mètres de l’arrivée, il y a tous ces gens qui ne vous connaissent pas mais vous applaudissent, vous encouragent, vous félicitent pour ce que vous venez de faire. Je retiens mes larmes plusieurs fois avant ce fameux virage qui annonce mon arrivée. Ça y est, je tourne vers l’arrivée, mon papa et ma maman sont là, fiers de moi. Je le vois dans leurs yeux, pas besoin de parler. Je les embrasse car c’est aussi grâce à eux. Ils m’ont été d’une aide précieuse même si on n’est pas digne de de leur faire le retour au moment de la course car on est dans notre bulle. Ma maman me filme pour avoir un petit souvenir à partager. J’avance de quelques mètres, mon Poto Chita (Thomas) est là avec 3 autres copains de Brétignolles, ils m’acclament et me font une Ola. Le speaker m’annonce à son micro, et vante les Vendéens qui sont très représentés ici.
Encore mieux, tous les copains du RAPV sont le long de la ganivelle, me tendant leurs mains pour taper dedans, une vraie famille ce club !
Ça y est, je l’ai fait ! Je n’y crois pas. 169 km en 38H58. Je m’étais mis 42Heures pour le faire ! C’est incroyable. Je suis fier de moi, c’est une expérience hors du commun, une course qui allie, le sport, la performance, les paysages, le mental, la douleur, la joie, la fatigue, la gestion de ses efforts, la convivialité, le respect.
Un ensemble de choses que l’on ne vit pas tous les jours.
Maintenant, je vais me reposer un peu, pas trop non plus car je ne pourrais pas me passer de courir en nature. Mais le corps à besoins de récupérer pour repartir à nouveau.